Épilogue

Ustarte, debout sur son balcon, regardait les jardins intérieurs. La petite Elanin tressait des fleurs blanches pour en faire une couronne pour le puissant homme barbu assis près d’elle, au bord de la mare. Diagoras était installé tranquillement sur un banc de marbre et les regardait.

Le serviteur, Weldi, vint la rejoindre.

— Garianne a remis l’arbalète de l’Homme Gris dans le musée, prêtresse, dit-il.

Elle hocha la tête et continua à regarder l’enfant et le guerrier. Elanin tendit la main, et Druss inclina la tête pour recevoir la couronne de fleurs.

— Pourquoi les voix l’ont-elles quittée ? demanda Weldi.

Ustarte se détourna du balcon.

— Tous les mystères ne peuvent pas être résolus, Weldi. C’est bien ce qui rend la vie si fascinante. Peut-être l’offre de sacrifice de Skilgannon a-t-elle suffi. Peut-être Garianne est-elle tombée amoureuse de lui, et cet amour lui a-t-il apporté la paix. Peut-être l’âme de l’enfant qu’elle porte a-t-elle adouci son besoin de vengeance. Peu importe. Elle n’est plus hantée.

— Et Skilgannon ignore qu’il va être père.

— Oui. Un jour, peut-être… Regardez l’enfant, Weldi. N’est-elle pas superbe ?

— Elle l’est, prêtresse. Un délice pour les yeux. Sera-t-elle quelqu’un d’important pour le monde ?

— Elle l’est déjà.

— Vous savez ce que je veux dire. Les deux plus grands guerriers du monde se sont alliés pour la sauver. Ils ont risqué leur vie. Ils ont combattu une sorcière et un être maléfique armé d’épées magiques. Le résultat devrait pouvoir changer le monde, non ?

— Ah ! oui, dit-elle. Moi aussi, j’aime ces histoires romantiques. Le retour de l’âge d’or, le bannissement du Mal, la petite princesse qui sera un jour un grand personnage.

— Exactement. Un des nombreux avenirs montre-t-il ce genre de choses ?

— Ils montrent qu’Elanin sera heureuse, et aura des enfants heureux. N’est-ce pas suffisant ?

— Je ne sais pas, reconnut Weldi.

— Dans quelques années, Druss la Légende se tiendra sur les remparts de Dros Delnoch et défiera la plus grande armée que le monde ait jamais connue. Il le fera pour sauver les Drenaïs du massacre, et garder vivant le rêve de la civilisation. Cela vous plaît davantage ?

— Ah oui ! prêtresse !

Elle lui sourit avec affection.

— Et croyez-vous que Druss trouverait ça plus important que sauver cette enfant d’un lieu de ténèbres et d’horreur ?

Weldi regarda le guerrier, dans les jardins, avec la ridicule couronne de fleurs sur ses cheveux grisonnants.

— Non, je suppose que non, reconnut-il. Pourquoi ?

— Laissez-moi d’abord vous poser une question, dit Ustarte. Si un héros voit un enfant en train de se noyer, le héros a-t-il besoin de savoir que le sort du monde est en jeu avant de sauter dans l’eau et de le sauver ?

— Non, dit Weldi. Mais si nous jouons à ce jeu, que se passerait-il si quelqu’un disait au héros que l’enfant est destiné à devenir maléfique ?

— Bonne question. Que ferait Druss, dans ce cas ?

Weldi éclata de rire.

— Il sauterait à l’eau et sauverait l’enfant.

— Et pourquoi ?

— Parce que c’est ça que font les héros.

— Excellent, mon ami.

— Qu’arrivera-t-il, à Dros Delnoch ?

Ustarte rit.

— Votre curiosité est insatiable. Pourquoi ne pas me demander ce que vous voulez vraiment ?

Il sourit.

— J’aimerais voir un des nombreux avenirs. Mais un bon. Rien de déprimant. Je sais que vous avez exploré le futur, prêtresse, parce que votre curiosité n’est pas moins grande que la mienne.

— Prenez mon bras, dit-elle.

Ensemble, ils marchèrent dans les couloirs intérieurs du temple et arrivèrent enfin à une petite pièce. Une lumière douce et dorée apparut autour d’eux quand Ustarte entra. La pièce était fraîche et tranquille, et une odeur de cèdre flottait dans l’air. Il n’y avait pas de fenêtres, et pas de meubles. Trois des quatre murs étaient en roche rouge grossière, et le quatrième en verre lisse. Ustarte resta un moment devant, regardant leur reflet.

— Je vais vous montrer un des avenirs possibles, dit-elle. Un seul. C’en est un qui me plaît beaucoup. Mais il vous rendra seulement encore plus curieux. Vous êtes prêt ?

— Je le suis, prêtresse, dit Weldi, ravi.

Ustarte leva la main, et le verre se troubla puis devint noir. Des étoiles brillantes apparurent dans un ciel lointain, et ils se retrouvèrent face à une colossale forteresse illuminée par le clair de lune. Une vaste armée campait devant la forteresse. Weldi regarda dans le campement.

— Que font-ils ?

— Ils préparent un bûcher funéraire.

— Qui est mort ?

— Druss la Légende.

— Non ! cria Weldi. Je ne veux pas voir d’avenir si triste !

— Attendez !

Le verre se brouilla de nouveau, et alors, Weldi et la prêtresse eurent l’impression d’être sous une grande tente. Une silhouette puissante était là, entourée par des guerriers nadirs. L’homme se tourna, et Weldi vit qu’il avait des yeux violets au pouvoir étonnant. Un autre homme entra sous la tente.

— C’est Skilgannon, dit Weldi. Il est plus vieux.

— Dix ans de plus, dit Ustarte. Écoutez !

— Je suis venu réclamer la récompense que vous m’avez promise, Grand Khan.

— C’est un champ de bataille, Skilgannon. Mes richesses ne sont pas ici.

— Je ne demande pas de richesses.

— Je vous dois la vie. Vous pouvez me demander n’importe quoi que je possède, et je vous l’accorderai.

— Druss m’était cher, Ulric. Nous étions amis. Je demande seulement un souvenir de lui : une mèche de ses cheveux et un fragment d’os. Ainsi que sa hache.

Le Grand Khan resta un moment silencieux.

— Il m’était cher, à moi aussi. Que ferez-vous des cheveux et de l’os ?

— Je les placerai dans un médaillon que je porterai autour de mon cou.

— Alors, ce sera fait, dit Ulric.

Le verre se brouilla une fois de plus. Weldi vil Skilgannon partir à cheval du camp nadir, la grande hache, Snaga, en travers de ses épaules. Puis l’image s’effaça. Weldi resta un moment immobile, regardant son reflet.

— Qu’arrive-t-il ensuite ? demanda-t-il.

— Je vous ai dit que cela ne ferait qu’aiguiser votre curiosité.

— Oh ! ce n’est pas juste, prêtresse ! Dites-moi, je vous en prie !

— Je l’ignore, Weldi. Je n’ai pas regardé plus loin. Contrairement à vous, j’aime les mystères. Et je suis enchantée par les légendes. Et vous savez que, dans toutes les grandes légendes, il y a des constantes. Quand le royaume sera menacé, le plus grand des héros reviendra. Nous n’en dirons pas plus.

— Je pense que vous êtes très cruelle, dit Weldi.

Ustarte éclata de rire.

— À quoi vous attendiez-vous, de la part d’une femme qui est en partie louve ?

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